Le nouveau site CTZNS souhaite mettre en lumière le « sens des possibilités » du citoyen européen. Le site internet sera alimenté par l’apport d’étudiants en journalisme de l’école supérieure AP Hogeschool à Anvers qui partent en quête de « bonnes pratiques » de la société, d’initiatives positives qui relient les gens (les citoyens avec et sans papiers). Un rassemblement hétéroclite d’initiatives diverses, chacune susceptible d’offrir, à sa manière, une réponse à la question de ce qui peut générer du lien social.
Pour les préparer en profondeur à cette recherche, nous avons organisé un atelier du 20 au 24 février 2017 lors duquel les étudiants ont travaillé chaque jour avec un autre expert. L’avocate et militante des droits humains Mieke Van den Broeck (www.progresslaw.net) a familiarisé les étudiants avec la signification des droits humains par opposition aux droits civils et surtout avec le processus de propositions de loi qui n’est pas uniquement la prérogative de politiciens, mais aussi d’une citoyenneté active.
L’écrivain et inspirateur Jeroen Olyslaegers (www.debezigebij.nl/auteurs/jeroen-olyslaegers) a complété la contribution de Van den Broeck par son expérience de terrain : comment éviter, en sa qualité d’artiste, de travailler exclusivement de manière contemplative (à partir de sa tour d’ivoire) et comment être actif dans la pratique ? Comment peut-on, dans le climat politique actuel, attirer l’attention sur une perspective nouvelle et nécessaire, à savoir inclusive et égalitaire, à partir d’un engagement ferme sur ces questions ? Les réseaux sociaux, et par excellence Facebook, représentent selon lui un canal efficace et autonome à travers lequel il peut directement atteindre des lecteurs qui se sont détournés des médias traditionnels.
Le jeune duo d’étudiants entreprenants Hanan Challouki et Taha Riani, qui a lancé le site internet MVSLIM.com, s’est adressé avec passion aux étudiants à propos de la nécessité des récits inspirants provenant des quatre coins du monde qu’il recueille sur le site mvslim.com, lui-même né en 2015 de l’urgence de véhiculer une image plus complète de la réalité que celle qui apparaît jusqu’à présent sur des moteurs de recherche comme Google quand on tape le mot-clé « musulman ». La plupart des musulmans ne se reconnaissent absolument pas dans l’image brossée par les médias réguliers, qui font trop facilement le lien avec le « terrorisme » et les « conflits ».
Dans la conversation avec Rein Antonissen, le directeur de l’organisation d’aide et de protection aux réfugiés et demandeurs d’asile en Flandre, Vluchtelingenwerk Vlaanderen (www.vluchtelingenwerk.be), les étudiants ont pris conscience des situations souvent précaires des personnes réfugiées ayant demandé l’asile. Malgré les meilleures intentions du monde, un portrait journalistique peut provoquer l’issue fatale de la procédure en cours pour la personne en question.
Le philosophe social et politique Bart Brandsma a animé un atelier autour de sa « stratégie de polarisation » (www.polarisatie.nl). Il intervient en tant que conseiller et médiateur dans des situations de conflit dans le monde entier et accompagne, par exemple, la police du quartier bruxellois de Molenbeek en s’appuyant sur la stratégie de polarisation qu’il a élaborée. Bart Brandsma affirme que dans une situation conflictuelle, il est important de chercher de manière ciblée des personnes qui se situent dans l’espace « silencieux » entre les deux pôles : « les silencieux ». Il s’agit, par exemple, de policiers, d’enseignants, de bourgmestres et de journalistes qui sont en mesure de déminer les conceptions polarisées à partir de leur espace intermédiaire. En partant de l’idée que le conflit est inhérent à la société, qu’il s’agit d’un phénomène bien plus naturel qu’exceptionnel, Brandsma définit la paix de la façon suivante : « La paix est une longue rangée de conflits qu’on a su bien gérer. »
Au cours de la semaine, les étudiants ont également visionné le film KOSMOS (2015) de Ruben Desiere. Ce dernier a achevé ses études au KASK, à Gand, en 2014. L’année précédente, il a installé sa caméra dans l’ancien couvent du Gesù à Bruxelles et ne s’est pas borné à rester derrière son appareil en tant que spectateur. Il s’est focalisé sur un petit groupe de Roms et a passé beaucoup de temps dans le chaos des couloirs et des cellules de l’ancien couvent. KOSMOS est un portrait marquant de personnes qui ont travaillé avec lui autour de textes de l’écrivain polonais Witold Gombrowicz. Pendant le tournage de scènes de fiction, l’actualité affligeante de l’évacuation de l’ancien couvent s’est imposée à la caméra. La discussion avec Ruben Desiere du vendredi matin a révélé avec évidence que le langage (visuel) d’un journaliste peut exercer une très grande influence sur la perspective du lecteur/spectateur. La bande-annonce de la rétrospective de l’année 2016 de la chaîne de télévision flamande privée VTM ne nécessite quasi plus d’explication.
Riches de tout ce bagage, les étudiants partent au mois de mars à la rencontre de citoyens (avec et sans papiers) engagés dans des initiatives qu’ils ont eux-mêmes lancées. De « bonnes pratiques » qui ont pour objectif d’enrichir collectivement la vie. Les étudiants n’ont pas seulement l’intention d’effectuer des interviews selon la formule consacrée de questions et de réponses, mais espèrent entreprendre des activités et faire ainsi émerger des portraits et des récits humains dans lesquels s’inscrivent les initiatives qui relient la société au lieu de la diviser. CTZNS célèbre l’initiative citoyenne.